“The Parade”

Présentation

The Parade! Musique de défilé, musique de fête, parade de quartier et danses de rue… Si cet album porte un tel titre, c’est que
Yonathan Avishai envisage la musique comme vecteur de partage et de réjouissances collectives, ainsi qu’elle se vit dans toute la Caraïbe mais aussi à La Nouvelle-Orléans, terre de naissance du jazz où la tradition des parades de Mardi Gras est toujours vivace, ou encore dans les quartiers populaires de New York où depuis les temps anciens, du stride jusqu’aux boogaloos des sixties, les “block parties” et autres pique-niques impromptus transforment l’espace public en lieu de retrouvailles.

S’appuyant sur le trio fidèle qu’il forme avec deux instrumentistes parmi les plus demandés de la scène du jazz hexagonal — le contrebassiste Yoni Zelnik et le batteur Donald Kontomanou — Yonathan Avishai présente enfin le second chapitre de son projet « Modern Times » qui l’a révélé au public en 2015. Élargi aux dimensions d’un quintet, son groupe
accueille le saxophone alto et la clarinette de César Poirier ainsi que l’éventail de percussions du Cubain Inor Sotolongo, incorporant pour l’occasion à ce nouveau répertoire des touches de boléro, de habanera et des couleurs latines. Fidèle aux principes de son
esthétique, creusant la veine de son précédent album dont ce volume est le nouveau chapitre, Yonathan Avishai a enrichi son répertoire d’une série de compositions personnelles (hormis une très singulière reprise du Django de John Lewis) dont chacune est comme un tableau ou une histoire qu’il raconte avec le sens des nuances et de la construction qui ont fait sa réputation.

Développant une réflexion sur les cycles, il accorde une grande importance au silence, cherchant à donner à chaque note le sens et la résonance qu’elle mérite, dans l’équilibre subtil d’un groupe qui, tour à tour, est capable de jouer comme on marche sur des œufs ou de se livrer à une bataille percussive en forme d’orgie rythmique. Revenant comme à une source aux principes élémentaires du jazz — la pulsation du swing, l’élégance d’une simple mélodie, la puissance expressive du blues, l’obscure beauté d’un accord — Yonathan Avishai s’inscrit au cœur de ce genre qu’il a fait sien tout en sachant développer une voix éminemment personnelle et une poésie à la grâce toute chaplinesque, à l’humour et à la nostalgie entremêlées. 

D’un rythme élémentaire qui bat comme à l’éveil d’un (nouveau) monde jusqu’au groove syncopé qui invite à s’abandonner à la danse en passant par un piano qui prend des accents de kora mandingue ou des couleurs diminuendo à la manière d’un Duke Ellington, d’une chanson aux allures de conte pour enfants à la profondeur de timbre d’une clarinette comme surgie de quelque salle de bal décrépie de la vieille Havane, Yonathan Avishai continue de cultiver les multiples recoins de son fertile jardin, pianiste aux pouces verts qui semble faire pousser entre les touches de son clavier des guirlandes de fleurs mélodiques et éclore des graines magiques d’où jaillissent un monde onirique, coloré et enchanteur.